Bonne Année ! » Deviens ce que tu es »
Le jour de l’an n’a pas toujours été fêté le 1er janvier. Chez les Babyloniens, il était célébré à l’équinoxe de mars, chez les Égyptiens, au moment de la crue du Nil autour du 15 juillet. Ce fut César, en 45 av. J.-C., qui décida à Rome que le jour de l’an serait le 1er janvier.
Le mot « janvier » vient des mot latins Janus et janua qui veulent dire « porte », « portail » ou « découverte ».
Tous les portails de Rome étaient sous la protection de Janus (1) et on les utilisait tantôt pour rentrer tantôt pour sortir. Ils représentaient les deux visages du dieu : celui qui regarde vers l’avant, vers l’avenir et celui qui regarde vers l’arrière, vers le passé.
C’est exactement ce que l’on fait le soir du réveillon, en se retournant sur l’année passée, tout en voulant faire table rase, oublier ce qui était négatif, aux sons étourdissants des feux d’artifice, des concerts de klaxons, et autres bruits, pour chasser les mauvais esprits de l’année écoulée et pouvoir enfin recommencer un nouveau cycle, en regardant vers l’avenir. Un avenir que des mets copieux et abondants devraient rendre propice !
Dans cet étrange moment de passage d’un cycle à l’autre, les frontières et les différences s’estompent et nous inclinons à exprimer nos meilleurs vœux non seulement à nos familles et nos amis mais également à des inconnus.
Ce pouvoir d’exorciser le passé et de rendre favorable l’avenir, semble être le point commun de toutes les traditions du Nouvel An, des différents peuples de la Terre, d’hier et d’aujourd’hui. Et même si la plupart des gens ne croient pas aux vœux qu’ils expriment et aux décisions qu’ils prennent, tout le monde souhaiterait qu’ils s’accomplissent.
Au milieu de ce « consumérisme du divin marché » dont nous parle Natacha Polony (2), respecter autrui et lui vouloir du bien, semble déjà moralement très correct mais ce n’est pas suffisant pour le philosophe.
Friedrich Nietzsche nous éclaire sur l’utilisation philosophique du Nouvel An.
En exergue du Livre 4 de l’ouvrage Le Gai Savoir, intitulé Sanctus Januarius (3), Friedrich Nietzsche écrit à propos du Nouvel An : « Je veux, en n’importe quelle circonstance, n’être rien d’autre que quelqu’un qui dit oui. »
Stéphane Floccari, auteur du livre Nietzsche et le Nouvel An (4) fait ressortir que le Oui de Nietzsche est le grand Oui à la vie, l’amor fati (5) qui embellit toute chose. C’est une invitation à mettre en pratique le « deviens ce que tu es », à laisser tomber les vœux pieux pour les transformer dans un véritable engagement à soi-même.
Dire oui à la vie, c’est accepter sans crainte ses épreuves, comprendre le sens à de ses douleurs, trouver le sens de sa vie et aspirer à réaliser ce que les Anciens appelaient une vie « bonne », indépendante des circonstances et des personnes.
Les règles morales sont les conditions nécessaires d’une vie pacifiée mais aucunement les conditions suffisantes d’une vie « bonne ». Comme le disait Pascal, elles « reflètent les réalités qui sont d’un autre ordre ».
Tirer un enseignement de nos souffrances, bien vieillir malgré les maladies, apprendre à mourir et à vivre, relèvent d’une spiritualité au sens large, d’une quête intérieure qui nous rend victorieux de nous-mêmes.
Que l’année 2018 nous soit propice à réaliser ce vœu d’âme !