La fête de l’été et le feu de la Saint-Jean
Le solstice a lieu le 21 juin, premier jour de l’été, le plus long de l’année. C’est l’époque où le soleil atteint sa hauteur maximale. Il est célébré, entre autres, avec des feux de joie qu’on allume au soir et qui brûleront toute la nuit.
À Paris, autrefois, c’était le roi qui allumait le feu de la Saint-Jean, sur la Place de Grève, aujourd’hui Place de l’Hôtel de ville. Il est aussi traditionnel de veiller toute la nuit – la plus courte de l’année – pour accueillir, à l’aube, le jour le plus long. C’est également un moment privilégié pour aller, au petit matin, cueillir les plantes médicinales, appelées simples au Moyen-Âge.
Solstice d’été et feux de la Saint-Jean
Dans la tradition chrétienne, alors que le solstice d’hiver est associé à la Saint-Jean d’hiver (saint Jean l’évangéliste, le 27 décembre), le solstice d’été est associé à la Saint-Jean d’été (saint Jean-Baptiste) et se fête le 23 juin. Il marque le début des récoltes et on se réunit traditionnellement autour de feux de joie pour une grande fête champêtre. Ces derniers représentent la chaleur et la lumière du soleil, particulièrement intenses au moment du solstice.
Les flammes et le feu, associés au soleil qui brûle d’un feu puissant et vital, font partie intégrante des célébrations de la Saint-Jean et de l’été. Les feux de joie sont à la fois une célébration et une offrande : l’énergie du soleil va en s’amenuisant jusqu’au solstice d’hiver, allumer des feux est donc une façon de soutenir la puissance du soleil, de lui rendre un peu de ce qu’il nous a donné en nourrissant ses flammes de sa propre énergie. Les feux symbolisent et favorisent la fertilité, la force et la chance pour la moisson à venir.
Le soleil est fréquemment représenté sous la forme d’une roue : faire rouler des roues en feu le long d’une pente, pour évoquer la force déclinante du soleil, fait partie des rituels du solstice.
En Bretagne, au XIXe siècle
Le récit de la fête de la fête de la Saint-Jean que nous présentons ci-dessous est extrait d’un roman pour la jeunesse paru en 1886. L’histoire se passe en 1860, dans le golfe du Morbihan, entre Locmariaquer et la Trinité, non loin de Carnac (1).
« Le lendemain… était le 24 juin. Ce jour-là, les jeunes gens de Kerlo, garçons et filles, n’allèrent guère à la pêche ni aux champs ; tous, dès le matin, se répandirent sur les landes pour cueillir le plus de fleurs possible, afin de fêter joyeusement la Saint-Jean… Ils faisaient main basse sur le genêt aux fleurs d’or, sur la bruyère aux grelots roses, sur la gentiane d’un bleu sombre ; tout leur était bon : coquelicots, marguerites, bleuets…
Et le soir, tout le monde avait pris rendez-vous pour assister aux feux de la Saint-Jean. Sur toutes les hauteurs, les villageois avaient formé des bûchers avec le bois mort ramassé dans les landes ou les champs, et les avaient entourés de guirlandes tressées avec les fleurs.…
Un bûcher gigantesque avait été formé en arrière de Men-er-Trésoul, et M. Kerbrel (le curé), selon la coutume, devait le bénir. Les villageois, après avoir couru dans toutes les rues de Kerlo, en chantant et en frappant sur les larges bassines qui servent à cuire la bouillie de blé noir, arrivèrent à l’entrée de la lande ; les joueurs de biniou les avaient devancés, et ils avaient déjà joué leurs airs les plus gais en l’honneur de Mme de Pers et de ses invités (la châtelaine du village). Tous, armés de torches, s’approchèrent bientôt du bûcher, et un paysan présenta un tison allumé à Marc, (le fils de la châtelaine, veuve), qui eut l’honneur d’y mettre le feu. Autrefois, à Paris, c’était le roi lui-même qui jouissait de ce privilège. Bientôt le bois commença à craquer, des étincelles pétillèrent, et de joyeuses flammes se firent jour à travers les branchages des bourrées. Les paysans criaient, selon l’antique usage :
« Sautez, Vari,
« Sautez, Anna,
« Sautez, Yann »
Et quand le bûcher fut bien allumé, M. Kerbrel le bénit ; alors tous, se prenant par la main, exécutèrent une ronde qu’ils accompagnèrent d’anciennes ballades, de cantiques, de refrains joyeux. C’était un gai spectacle… Quand les flammes cessèrent de s’élever, chacun se jetant en avant du brasier, saisit un tison qui, une fois éteint, devait être emporté précieusement dans les chaumières, pour y être déposé au chevet du lit, à côté de la Sainte Vierge, afin de préserver les habitants des Korrigans et de leurs malices. Ensuite, plusieurs, ramassant des poignées de cendres, les jetèrent au vent.
« Elles emportent ainsi tous les maux d’un pays », disaient les plus entendus, tandis que les plus jeunes se précipitaient sur les guirlandes, et en arrachaient les fleurs, qu’ils gardaient toute l’année contre les maladies ou les orages. »