La momification en Égypte des interprétations divergentes au fil du temps
De nouvelles théories sur les raisons de la momification dans l’Égypte ancienne sont avancées par certains égyptologues britanniques et donnent lieu à l’exposition « Golden Momies of Egypt » au Musée de Manchester, depuis février 2023.
Tout d’abord il faut souligner que la mise à jour, en 2016, d’un immense atelier de momification souterrain sur le site de Saqqarah, au sud du Caire, a déjà permis de mieux comprendre les matériaux et les techniques utilisés pour les embaumements. Maxime Rageot, chercheur à l’université de Tübingen en Allemagne a publié dans la Revue Nature les résultats des analyses faites sur des dizaines de récipients en céramique, trouvés dans l’atelier, et datant de 2.500 ans. Ces récipients contenaient encore des substances partiellement analysables, car certaines très volatiles avaient subi des dégradations évidentes, mais la présence d’huile de cèdre, de genévrier, de cyprès et également de graisses animales, a pu être confirmée. De plus, des mentions portées sur les récipients ont donné des précisions sur les parties du corps traitées différemment par des substances spécifiques. Certains produits d’origine exotique et n’existant pas actuellement en Égypte ont pu être importées d’Asie ou exister sur place dans ces temps reculés.
Mais la question la plus intéressante était d’essayer de comprendre la véritable raison du processus de momification pratiqué par les Égyptiens. Jusque-là, les experts qui avaient découvert les premières momies à l’époque victorienne, avaient supposé, et cette supposition s’était affirmée au fil du temps et devenue historique, que les Égyptiens embaumaient les corps pour assurer leur conservation, cette supposition étant en fait le fruit des mentalités de l’époque sur l’interprétation de la vie après la mort.
Mais les égyptologues britanniques préfèrent dire que la momification correspondait à des croyances religieuses. Les rois et les reines étant considérés comme des dieux et des déesses vivants, l’embaumement fut utilisé pour transformer les corps des pharaons en statues pour leur donner une forme divine. Les pharaons n’auraient pas été momifiés dans le but de conserver leurs corps, mais seulement pour respecter certaines croyances vis-à-vis de l’au-delà. « C’est une distinction subtile, mais c’est une distinction importante » a précisé Campbell Price, conservateur au Manchester au Royaume-Uni, dans une interview accordée à Business Insider. Pour preuve, le corps du roi Toutankhamon par exemple, a été retrouvé collé au fond de son cercueil.
La momification, qui pouvait prendre 70 jours, visait à transformer le défunt en être divin. C’est un mélange de rituels religieux qui associent les prières, les brulages d’encens, l’onction avec différents baumes et résine, et enfin l’enveloppement du corps avec des bandelettes. On connaît les pratiques d’embaumement par plusieurs papyrus, notamment un qui se trouve au Louvre et qui a été traduit en 2018. « L’imaginaire collectif s’intéresse beaucoup aux bandelettes, mais ce sont sans doute les baumes et résines utilisés au plus près du corps qui relèvent de la plus grande importance symbolique » explique Thierry Bardinet, docteur en sciences historiques et philologiques de l’École pratique de hautes études à Paris.
Il est intéressant de signaler que le Professeur Jorge Angel Livraga écrivait déjà en 1987 dans son livre Thèbes : « Pour les Égyptiens, la vie et la mort n’étaient que les deux faces d’une même médaille. Il n’y a qu’une seule Vie… qui avance sur deux pieds, la vie et la mort… pour répéter le cycle tant qu’il y a un chemin à parcourir et pour se fondre à la fin dans l’Âme du monde, l’Esprit solaire, Amon-Râ. La première momification, selon la Tradition, a été réalisée par Anubis lui-même…. Ce rite sera ensuite reproduit sur Terre pour tout pharaon, prince, prêtre ou tout personnage important qui mourainet, après que les rites qui aidaient son âme aient été réalisés… »