Savoir ou connaître ?
De la curiosité à la connaissance ; de la connaissance au savoir et à la Sagesse : un parcours à entreprendre.
Il y a quelques années, Bacon (1) disait que « la satisfaction de la curiosité est, pour certains hommes, la fin de la connaissance ». Et il y a plus d’un siècle, un grand Maître ajoutait que « Bacon s’est trouvé, en formulant cette vérité rebattue, autant dans le juste que l’étaient ceux qui l’ont connue avant lui en séparant la Sagesse de la Connaissance. »
Curiosité
La divulgation des connaissances dans toutes les branches, scientifiques, philosophiques, artistiques, sociologiques, politiques, économiques, et tant d’autres qui nous échappent maintenant, ont obtenu, plus qu’une diffusion sérieuse, la création d’un marché destiné à satisfaire des curiosités. Et si la curiosité ne se manifeste pas ou n’existe pas, apparaît quelqu’un qui se charge de la promouvoir à travers une propagande sensationnaliste et un usage large et sans discrimination des moyens de communication.
De plus, c’est dire que la curiosité n’est jamais satisfaite de cette façon, parce que le public – dans sa majorité – n’est pas préparé à épuiser en profondeur des sujets aussi divers et parce que les disciplines mentionnées plus haut – ainsi que celles que nous pouvons avoir oubliées de mentionner – changent de postures et d’opinions avec la même rapidité avec laquelle elles découvrent ou croient découvrir de nouveaux aspects dans le cadre de leur investigation. Il y a ainsi des thèmes et de la curiosité pour un moment.
Connaissance
Mais avançons d’un pas. Passons de la simple curiosité à la connaissance développée et approfondie pendant des années d’étude et de travail. Bien que cela puisse paraître le but le plus élevé à atteindre, ce n’est pas non plus le cas, parce que la connaissance ne concerne qu’une partie spécifique de la personne : elle occupe, selon les cas, le mental, le corps, les sentiments mais il est très difficile qu’elle ouvre les portes impressionnantes de l’intuition, les ressorts cachés de l’âme, le désir insatiable de perfection, quelle que soit la tâche à laquelle on se soit attaqué.
Sagesse
C’est là que nous entrons dans le domaine de la Sagesse. Savoir est beaucoup plus que connaître. C’est une connaissance qui ne s’oublie pas, qui ne réside pas simplement à la superficie extérieure de la mémoire mais dans les plis les plus profonds de l’être véritable. Ce qu’on sait devient partie de soi-même. Et comme soi-même « est » toujours, bien qu’il ne soit pas le même enfant ou adulte, la Sagesse oblige à cette avancée en maturité qui court avec le Temps, même si c’est un temps qui se fait éternel lorsqu’on se réfère à sa propre croissance.
Nous vivons une époque de grandes conquêtes. Tous prétendent nous offrir le mieux. Exigeons donc le mieux, et commençons par l’exiger de nous-mêmes. Là où nous mettons la main, les yeux, le sentiment ou l’idée de notre labeur, faisons-le dans un esprit de grandeur et de perfection, avec la vision qu’à force d’ampleur elle devienne sœur des sciences, des arts, des religions et des philosophies.
Ce qui importe pour nous est de SAVOIR.
(1) Francis Bacon, scientifique, philosophe et homme d’État anglais (1561-1626), un des pionniers de la pensée scientifique moderne
Par Délia STEINBERG GUZMAN
Extrait de l’ouvrage, Le héros quotidien, réflexions d’un philosophe
Traduit de l’espagnol par M. F. Touret
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